Nigel Cantwell


En 1991, l’Assemblée générale des Nations Unies a pris une initiative inhabituelle: elle a demandé au Comité des Droits de l’enfant, nouvellement créé, d’envisager l’élaboration d’une Observation Générale. Celle-ci donnerait ses interprétations sur la nature précise des droits des «enfants des rues» et, par conséquent, des obligations de l’Etat envers ces derniers.

Si la Convention relative aux droits de l’enfant ne fait pas référence explicitement aux enfants dans cette situation, elle s’applique néanmoins, bien sûr, à tous les enfants sans exception. Ceci dit, certains analystes estiment que les «enfants des rues» symbolisent précisément ce qui se passe quand aucune disposition du traité n’est respectée: manque de soutien aux familles, déni d’accès aux services de base comme la santé, l’éducation, l’hébergement et la nourriture, aucune protection contre les nombreuses formes d’exploitation et de violence, et impossibilité de faire entendre leur voix. Certains s’entendent donc pour conclure que les «enfants des rues» ne sont de facto pas couverts par la Convention.

Casa Alianza est parmi les ONG qui connaissent le mieux ce genre de problèmes et dilemmes et les diverses raisons pour lesquelles les enfants se retrouvent en situation de rue. D’un côté, l’Association cherche donc à offrir des services appropriés et des options sur mesure pour que chaque enfantait son mot à dire pour déterminer son avenir. D’un autre côté, elle doit faire face à d’innombrables cas de violations délibérées des droits de l’enfant, depuis les activités criminelles visant à procurer des enfants «abandonnés» à l’adoption jusqu’à l’exploitation sexuelle et l’assassinat. Ce ne sont jamais des tâches faciles, mais elles sont rendues encore plus délicates à accomplir quand elles se font au nom d’enfants tellement stigmatisés et exclus qu’il faut partir de zéro. En outre, le travail se fait dans un climat au mieux d’indifférence totale, au pire d’hostilité ouverte, de menaces et d’agression. Le fait que Casa Alianza n’ait jamais reculé ou baissé les bras est à la mesure de l’engagement sans faille de son personnel, de ses volontaires et de ses donateurs.

Cet appel de l’Assemblée générale de l’ONU en 1991 semblait être tombé aux oubliettes. Mais le Comité des Droits de l’enfant a récemment indiqué son intention de rédiger une telle Observation Générale sur les «enfants des rues». Casa Alianza acquerra alors une base encore plus solide pour poursuivre son travail et persuader les autres de sa justification. Avec le soutien continu de ses amis, Casa Alianza aura, espérons-le, également les ressources pour tirer le meilleur de cette opportunité.

Nigel Cantwell,
Consultant en politiques de protection de l’enfance (2007)